Cher connard – Virginie Despentes #293

Vue : Ça commence par un règlement de compte. Rebecca, actrice vieillissante, s’insurge devant un post Instagram d’Oscar. Une correspondance par mails naît alors. D’échange en échange, chacun va se révéler, apprendre à connaître l’autre et se connaître.

Le roman débute fort. Les mots sont durs et acerbes. Ma curiosité est attisée. Les « Chroniques d’un désastre annoncé » sont loin de la vérité. C’est la métamorphose d’un affrontement, d’un clash initié sur les réseaux sociaux.

Les deux personnages, tout un programme ! Oscar, auteur alcoolique et drogué est sur la mauvaise pente suite à une histoire d’harcèlement sexuel avec son ancienne attachée de presse, aujourd’hui influenceuse féministe populaire. Rebecca, actrice sur le déclin, droguée et le verbe haut, se refuse à entrer dans le moule. Cette rencontre e-épistiolaire entre ces deux protagonistes qui se sont connus pendant leur enfance, déclenche des débats riches. S’ils s’opposent dans leur caractère, des points communs les rapprochent. Dans ces hiatus et ses ressemblances, des interrogations émergent et sont de la matière à mes réflexions.

Si je ne m’attache ni à Oscar ni à Rebecca, ma lecture n’en reste pas moins captivante. J’aime lire leurs pensées, leurs confessions. Les sujets sont nombreux et variés allant de l’addiction à l’estime de soi, en passant par le regard des autres, le féminisme, la parentalité, le cinéma ou encore les relations amoureuses. Un passage sur l’amitié page 175 m’a ému. La plume de Virginie Despentes que je découvre enfin (cela fait longtemps que je désire la lire) est authentique, brutale parfois, trash aussi mais sans être gratuit selon moi, je trouve au contraire que c’est justifié. Elle sert le récit comme le propos.

En lisant « Cher connard », je me suis posé la question de l’écriture. L’écriture dans le sens écrire à l’autre. C’est rare de nos jours. Les réseaux sociaux, les mails, les sms ont pris le relais. C’est de l’instantanéité. Écrire une lettre pour l’autre demande du temps. Cela nécessite une prise de recul, invite à la réflexion. La correspondance sort l’expéditeur comme le destinataire de la frénésie des aiguilles qui tournent. Elle est un pendant à l’écriture littéraire (roman, essai, poésie…). Je pense que c’est aussi une des raisons qui me pousse à écrire. Je suis tenté de me rendre dans une papeterie et acheter tout le nécessaire pour écrire des lettres !

Mon expérience Despentes fut un plaisir. J’en lirai d’autres. Qu’avez-vous lu de cette autrice ?

Ouïe : Un clavier d’ordinateur

Goût : La cocaïne

Odorat : Le café

Toucher : Un téléphone mobile

Éditions : Grasset
Pages : 344
Prix : 22 euros

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